Après avoir connu les paysage à couper le souffle du Sud Lipez, il est venu le temps de découvrir la Bolivie rurale. Nous parcourons les routes asphaltées qui traversent le haut plateau bolivien. Avec un bonus un peu fou une fois arrivé à La Paz...
La sortie d'Uyuni est sablonneuse mais plutôt facile grâce aux précipitations de la veille. Nous déjeunons à Colchani, dernier lieu touristique avant La Paz.
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Adieu le tourisme de masse! |
Après un après-midi ensoleillé de route, nous plantons notre campement en contre-bas d'un petit col.
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Joli endroit pour passer la nuit, pour autant qu'il ne pleuve pas! |
Alors que nous cuisinons, le ciel s'assombrit, et des éclairs se rapprochent. Il devient évident que nous n'échapperons pas à un orage, nous creusons des tranchées autour de nos tentes pour nous protéger de la boue. Dans la précipitation, nous nous y attelons à l'aide pierres et de nos pieds, repoussant l'heure du repas à plus tard. Quelques minutes plus tard la tempête nous atteint, déversant des quantités d'eau impressionnantes. Après avoir vérifié que nous sommes à l'abri du ruissellement, nous mangeons tous dans ma tente, écoutant l'apocalypse qui sévit dehors.
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Bon appétit! |
A une heure du matin, nous sommes réveillés par un groupe de paysans qui vient vers nos tentes. Lorsqu'ils aperçoivent Martin qui surveille ce qu'il se passe, ils font demi-tour. Nous ne saurons jamais quels étaient leur intentions.
Fatigués par cette nuit courte et peu rassurante, nous repartons après avoir nettoyé notre équipement touché par la boue. La route est mauvaise, et compte de nombreux passages à gué. Afin de garder nos pieds hors de la boue, il faut appuyer de toutes nos forces sur les pédales, ce qui ne manque pas de couvrir nos vélos de boue.
La route après la pluie et le passage des camions. |
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Avant la tempête... |
Dans l'après-midi, le ciel s'assombrit à nouveau. Nous nous retrouvons coincés sous un violent orage sur l'altiplano, à 3800m. Sans le moindre arbre dans les alentours, nous devenons de parfaits paratonnerres mobiles. A un moment, un éclair vient atterrir tout près de nous, suivi moins d'une seconde après d'un impressionnant coup de tonnerre. Nous accélérons encore le rythme, jusqu'à trouver refuge entre deux petites collines. Une fois que l'orage s'est éloigné, nous reprenons la route avec un violent vent de face. Nous arrivons à la tombée de la nuit à Rio Mulatos, épuisés. Après un "completo" typiquement bolivien (soupe + plat principal), nous allons nous coucher tôt.
Le troisième jour, la route devient meilleure avant de disparaître soudainement, une puissante rivière nous séparant de Sevaruyo.
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On cherche une solution... |
Après avoir envisagé de traverser la rivière via un pont ferroviaire, nous écoutons les conseils d'un autochtone et passons finalement par un petit pont piéton situé un kilomètre en aval. Avant que l'orage quotidien arrive sur le village, nous nous réfugions dans un hôtel qui s'avère être tellement sale que nous utilisons notre équipement de camping pour rester à distance de la literie.
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Bien mieux que le pont ferroviaire! |
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Hôtel miteux à Sevaruyo |
Notre salut du moment survient le quatrième jour: après 600km de mauvaise route, nous retrouvons une douce route asphaltée.
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Les derniers kilomètres de souffrance |
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Enfin, l'asphalte! |
Nous volons presque jusqu'à Huari où nous déjeunons avec Delia, une productrice de quinoa. Elle nous explique que les Boliviens ne mangent pas beaucoup de cette céréale car un traitement complexe est nécessaire pour la rendre comestible. La majeure partie des récoltes est donc rachetée par de grands groupes industriels qui pour des raisons financières évidentes préfèrent s'orienter vers l'exportation.
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Champs de Quinoa sur le haut plateau bolivien |
Après cette pause instructive, nous terminons la journée à Challapata, où nous rencontrons une
famille de Français faisant un voyage autour d'un monde d'un an. Fait impressionnant, les parents enseignent à leur enfants toutes les matières scolaires, afin que ceux-ci puissent reprendre l'école à leur retour sans perdre une année.
Le retour sur les routes asphaltées signifie théoriquement que nous sommes de retour à a civilisation. Le lendemain matin, au moment de passer un péage, nous sommes arrêtés par un policier: "Tu hablas Spanish? Pasaporte!". Après quelques questions: "I'm just a policeman but the employee is asking for 3 bolivianos (CHF 0.50) for the toll fee. Actually it might be 3 or 5 bolivianos". Trouvant cela très étrange, car nous n'avions rien payé lors du dernier péage à Huari, je me rends dans la cabine de l'employé et demande à voir le document officiel qui stipule que les vélos doivent payer. Grand silence. Au même moment, une voiture passe derrière moi: "Hey Felipe! Que tal?". Un local rencontré la veille vient de me reconnaître depuis son pick-up. Le policier et l'employé du péage se regardent, dépités: "Ok, you can pass, go!". Amusés par l'échec de ces officiels malhonnêtes, nous mettons le cap sur Poópo, que nous atteignons à midi. En attendant l'orage quotidien de milieu d'après-midi, nous jouons au baby foot sous les regards curieux des enfants du village.
Le lendemain, nous partons tôt après avoir ingurgité un completo en guise de petit déjeuner. Comme nous n'arriverons pas à rejoindre Oruro pour midi, et qu'il est difficile de manger en dehors des heures de repas, nous nous arrêtons de nouveau à 10h30 pour un autre completo.
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Entrée dans Machacamarca |
Le sens bolivien des affaires est quelque peu particulier car cela coûte le même prix de commander un completo (Séb) ou juste le plat principal (Martin et moi). Nous arrivons dans l'après-midi à Oruro où nous comptons nous reposer pour la journée. Pour la première fois en Bolivie, nous rentrons dans un restaurant où il est possible de choisir son menu. Nous nous soignons donc à coup de pizzas et de hamburgers, afin de changer de l'habituelle et saine viande de lama.
Après cette petite pause à Oruro, nous repartons en direction de La Paz. La future autoroute à quatre voies La Paz - Oruro est en construction, et le trafic est important. Heureusement pour nous, une partie de la route est déjà terminée mais pas encore ouverte au trafic, ce qui nous offre une piste cyclable "king-size", à l'abri des agressifs conducteurs de bus.
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Notre piste cyclable |
Lors de notre pause de midi à Caracollo, nous avons le droit à une leçon d'hygiène rurale bolivienne. Un camion s'arrête, son chauffeur en descend, et "caché" par son camion, urine sur sa roue à quelques mètres de notre table avant de venir s'asseoir à côté de nous.
En fin d'après-midi, nous faisons une petite pause à Konani. Alors que nous dévorons des ailes de poulet, deux petites filles rigolent aux grimaces de Martin. Soudain l'une d'entre-elle s'approche de lui: "Regalame plata! (donne-moi de l'argent)". Un peu choqués par cette "corruption culturelle" et après avoir en vain cherché un hébergement, nous décidons de pousser jusqu'au prochain village.
Arrivés à Lahuachaca, nous visitons un "hôtel" complètement miteux. Le sol de la pièce est composé de terre et les lits sont sales. Lorsque je demande où sont les toilettes, le propriétaire me montre la cour. Surpris, j'insiste et il me montre une petite rigole, profonde de 5 cm au bord de la cour, visible de tous les côtés et disparaissant sous un mur. "Je l'ai nettoyée ce matin!". Choqués, nous trouvons un autre hôtel aux volets malheureusement fermés. Après avoir demandé à un voisin où est le propriétaire, je commence à marcher à travers le village pour le trouver. Finalement, un sympathique villageois me prend sur sa moto et m'amène chez la bonne personne. Le bâtiment, qui semblait joli de l'extérieur, est en fait en construction. Nous sommes cependant si fatigués que nous décidons d'y dormir.
Le lendemain, je suis réveillé vers 6h du matin par le propriétaire qui inspecte son chantier. Après un petit déjeuner frugal, nous reprenons la route. Dans l'après-midi, nous longeons une ferme avec quelques vaches. Soudainement, deux chiens sortent et commencent à courser agressivement Martin, qui tente de les repousser à coups de pieds. L'un des molosses saute et mord violemment une sacoche arrière, ce qui a pour effet de projeter le vélo de Martin sur celui de Séb. Après s'être éloigné des sales bêtes, il est temps d'évaluer les dégâts.
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"Un bon chien est un chien mort" (Franfouet, ami cyclotouriste) |
Nous avons beaucoup de chance que le chien n'ait pas mordu le mollet de Martin (qui n'est pas vacciné contre la rage...)! Nous croisons un jeune homme à vélo allant dans l'autre direction et observons sa stratégie. Lorsque les chiens arrivent, il s'arrête immédiatement et positionne son vélo entre lui et ses agresseurs. Il commence ensuite à courir dans leur direction, ramasse des pierres et les canarde. Beau geste, car les deux chiens détalent.
Roulant sur une route en construction et par conséquent sans trafic, nous arrivons à l'entrée de Villa Loza-Tolar. Malheureusement, notre route se termine brutalement, coupée dans toute sa largeur par une profonde tranchée. Nous traversons un pâturage avec la permission de son berger. Après nous avoir accompagné à travers tout le terrain, le berger nous demande un "regalito" (petit cadeau). Un peu embarrassé, je lui propose une photo de groupe. Il semble souffrir de solitude et paraît ravi de la photo. Il insiste toutefois pour que Martin lui donne une petite pièce pour aller s'acheter de l'alcool...
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Le berger |
Arrivés au village nous dormons dans hôtel confortable et bon marché ayant accueilli de nombreuses personnalités boliviennes (parmi lesquelles Evo Morales).
Pour notre dernier jour avant La Paz, nous n'avons d'autre choix que de rouler sur une route à l'intense trafic. Après quelques heures de gaz d'échappement, nous rentrons dans El Alto, banlieue de La Paz. Malheureusement, nous sommes le 6 mars, fête annuelle de cette banlieue. De nombreuses routes, dont l'autoroute descendant sur La Paz, sont bloquées. Nous cherchons une alternative et terminons sur de petites routes descendant vers le centre, avec des pentes de 18%. Nous sommes impressionnés par l'urbanisation sans limite et les pentes incroyables de cette cité vertigineuse.
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Mieux vaut avoir de bon freins! |
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Collines impressionnantes |
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Eau du robinet de La Paz, captée dans une rivière polluée par une mine d'étain |
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Le chien de Bob Marley, croisé à La Paz, Bolivie |
Nos jantes sont en feu lorsque nous arrivons à la
Casa de Ciclista, où nous passerons une semaine.
BONUS!
Après une journée de repos, nous décidons de partir à l'assaut du Huayna Potosi (6088m), l'un des rare 6000m "faciles" d'Amérique du Sud (comprenez "l'un des moins difficiles"). Nous serons une équipe de cinq, encadrée par trois guides professionnels (et pleins d'humour) d'
Altitud6000.
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Huayna Potosi, vu depuis El Alto |
Le premier jour, nous apprenons à manier le piolet et les crampons, sur un glacier situé pas très loin du camp de base (4750m).
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Entraînement sur le glacier (avec Joel, notre compagnon suédois) |
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Martin sur une paroi de glace |
Le deuxième jour, nous marchons jusqu'au "Campo Alto Roca" (5130m), amenant avec nous tout l'équipement.
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Premier passage sur une arrête |
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Nos guides (de gauche à droite): William "Wallace", Juan Jose "Juancho" and Ismaël "El Pollo" |
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Juancho, fondateur d'Altitud6000 |
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Le refuge porte bien son nom |
Finalement, le troisième et dernier jour, nous quittons le refuge à 1h30 du matin, équipés et encordés. Même si nous n'emportons que le strict minimum dans nos sacs, l'ascension est difficile et lente. Le manque d'oxygène est épuisant et il est difficile de trouver le bon rythme. Au lever du soleil, nous ne sommes plus qu'à 100 mètres du sommet.
Lever de soleil sur les nuages |
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Les derniers 100 mètres de l'ascension |
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Des andinistes déjà en train de redescendre |
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Il suffit de garder l'esprit positif! |
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Dernière partie de l'arrête |
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On y est presque! |
Lorsque nous atteignons l'arrête finale, le soleil est déjà levé et des rafales de vent nous poussent légèrement. Sur notre droite, il y a 1000 mètres de vide, et seulement 200 mètres sur notre gauche! Le vertige n'épargne pas Martin et Séb, mais cela ne nous empêchera pas de tous parvenir au sommet!
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Huayna Potosi, 6'088m! |
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Une descente technique |
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Avec nos guides et notre équipement, nous sommes en sécurité |
Nous sommes à présent de retour en sécurité à La Paz et nous reposons avant d'attaquer l'avant-dernière étape de notre périple sud-américain: La Paz-Cuzco.
Ambiance fribourgeoise, au restaurant SwissFondue de La Paz |
Impressionnant les jeunes! J'admire votre capacité à tout saisir à bras le corps et de profiter pleinement de tout ce qui s'offre: humains et montagnes (ouaaa! 6000m!)
RépondreSupprimerJe vous embrasse tous
Elisabeth
Saluts les gars,
RépondreSupprimerVos commentaires m'impressionnaient déjà, les superbes photos le font vraiment, c'est chouette.
A+ Jean-Claude, La Paz
Une semaine de repos...Tiens si on se faisait un petit 6000m. !
RépondreSupprimerJe suis avec attention vos aventures palpitantes et j'admire les magnifiques photos.
Jean-Jacques
Bon alors là, les orages successifs, la boue, les chiens (je préfère celui de Bob aux autres carnassiers!) les hôtels miteux; heureusement compensés par les rencontres, la vue, l'asphalte parfois, les succès, les "completo" rassasiant, un peu de "junk food" et - tiens pourquoi pas - se transformer en alpiniste pour se préparer à la fondue... Voilà une grande étape qui n'a pas manqué de surprises!
RépondreSupprimerVous suivre sur le blog, c'est un peu comme prendre son roman préféré pour savoir ce que le prochain chapitre va nous offrir.
Merci et belle suite à votre extraordinaire aventure (merci aussi pour les liens vers la famille française, le cdc, j'en apprend des choses!)
Bises et amitiés
Christiane
Whaoooouuuuuuh!!!!!!
RépondreSupprimerEt votre spray au poivre contre les chiens??
Plein de pensées pour vous,
Petite Youm, impressionnée par vos exploits.
Incroyable!!
RépondreSupprimerDepuis décembre que je n'étais pas venu sur votre blog pour suivre la suite de vos aventures, hé bien il s'en est passé des choses! c'est fous fous fous ce que vous faites! Bravo pour ces exploits et pour ce blog qui fait rêver! Tout de bon pour la suite!
Céline G.
lindas fotos, me pone bien feliz que ustedes ya estan taaaaaaaan lejos, que su logro va bien y que akira este mejor de sus piernas.
RépondreSupprimerLos quiero y extraño.
Sigan adelante, un abrazo desde Chile.
Belén.