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Uyuni, Bolivia, le 24 février 2013

Le Sud-Lipez à bicyclette

La région bolivienne du Sud-Lipez est connue pour ses paysages splendides à des altitudes vertigineuses. Vu la qualité des pistes de sable qui la traversent, une expédition à vélo dans cette région n'est pas une mince affaire. Nous sommes quatre courageux pour relever le défi, notre ami Rémi s'étant joint à nous pour cette traversée mythique...


Parcours cycliste 1989292 - powered by Bikemap 
Avant de vous conter le début de la traversée, il me faut vous expliquer comment Rémi, ami d'enfance, a pu se joindre à nous d'une manière aussi inattendue. Il voyageait en bus et nous avait retrouvé à San Pedro de Atacama. En nous promenant dans la rue nous tombons nez à guidon avec un vélo de voyage tout équipé devant un magasin de souvenirs. Son propriétaire, qui l'a racheté à un voyageur français  accepte de le revendre pour une (grosse) bouchée de pain: 300 CHF. Un coup de pouce du destin qui nous permet de traverser ensemble l'une des plus belles région de notre itinéraire sud-américain.
Rémi le manouche vient compléter la fine équipe
Notre chauffeur nous évite une journée de montée en plein désert
Afin de nous éviter une montée de 45km que nous venons de parcourir dans l'autre sens, nous nous arrangeons avec un chauffeur chilien, qui charge nos vélos dans son pick-up. Nous reprenons donc la route au pied de l'imposant volcan Licancabur, qui culmine a 5900m. Nous ne reverrons plus d'asphalte lors de nos prochains 600km.
L'imposant volcan "Licancabur", 5900m, et son manteau blanc fraîchement tombé
La douane bolivienne est une petite maison en mauvais état située au pied du volcan enneigé. A l'intérieur du bureau, un énorme poster avec un femme dénudée. Les formalités de douane sont assez simples et nous continuons notre descente en direction de la Laguna Blanca.
La douane bolivienne de Hito Cajon
Le bus d'"Into the Wild" et ses nouveaux locataires
 Nous arrivons au refuge situé au bord de la Laguna Blanca. C'est l'entrée de la Reserva Nacional de Fauna Andina Eduardo Avaroa. Nous y mangeons une soupe de lama (il faudra s'y habituer c'est la seule viande disponible par ici), des pâtes puis dormons dans des lits de pierre bien confortables. Nous sommes seuls dans le refuge, tenu par Sarah une gardienne fort sympathique. Elle tente de soigner un bébé vigogne qu'elle a recueilli et qui est mourant. Sur demande de la gardienne et malgré nos avertissements, Martin accepte de lui donner un coup de main sous forme de Dolipran (anti-douleur). L'animal ne tiendra pas jusqu'au petit matin...
Sarah notre hôtesse, bien entourée
Rémi attaque sa deuxième journée de ripio
Laguna Blanca
La première journée, nous commençons par longer la Laguna Blanca, avant d'atteindre la Laguna Verde. Cette dernière contient toutes sortes d'éléments minéraux rares, comme de l'arsenic. Akira, qui ne résiste pas à l'envie d'y tremper ses lèvres, prétend n'avoir aucune séquelle.
Séb devant la Laguna verde
Peleton en formation serrée
Nous croisons Rooland, un cycliste hollandais sur le point de terminer sa traversée du nord au sud. Il nous donne quelques indications sur la route qu'il vient de parcourir. En fin d'après-midi, un ciel d'une grande noirceur nous attend au col.
Mhhh, c'est bien noir au niveau du col...
Séb et Martin arrivent au col
Le col et ce qui suit
Nous sommes tout de même à 4600m, et le grondement du tonnerre qui se fait toujours plus proche n'est pas très rassurant. Nous arrivons au col au sec. Mais depuis le sommet, 30km de "descente" (en fait du plat dans la boue) nous séparent de Polques, célèbre pour ses eaux sortant de la terre à 38ºC. Nous prenons finalement la neige, la grêle puis la pluie avant d'arriver frigorifiés et détrempés à Polques.
Mon vélo reçoit ses premiers flocons de neige

"Mamita", une petite vieille adorable et énergique (elle commence sa journée par un bain à 4h du matin), nous autorise à dormir par terre dans son restaurant. Vu que des chutes de neige abondantes sont attendue, nous décidons de passer une journée avec "Mamita" et sa famille, histoire de profiter des eaux thermales.
"Mamita" devant son restaurant (elle a beaucoup insisté pour que nous lui envoyions cette photo)
Le lieu-dit Polques a deux visages. Entre 16h et 7h du matin, c'est un hameau composé de deux maisons, faisant face à une lagune superbe peuplée de milliers d'oiseaux, au pied de montagnes culminant à plus de 6000m. C'est un bassin d'eau chaude où l'on se prélasse en regardant la nature, sans un bruit. Mais l'autre visage de Polques, la journée, c'est un balais incessant de 4x4 qui déchargent des flots impressionnants de touristes, tous voulant manger, aller au toilettes et se baigner dans ce bassin naturel. Le contraste est saisissant.
Akira se prélasse dans les eaux thermales de Polques
87 touristes se prélassent dans les eaux thermales de Polques
Vue depuis le restaurant de "Mamita": il a bien neigé, nous avons bien fait de ne pas partir
Après cette pause méritée, nous attaquons l'ascension du col le plus haut jamais atteint par notre corps expéditionaire: Sol de Mañana (4950m). Le sable et la boue rendent la montée difficile, nous arrivons finalement au sommet vers 13h. En contrebas du col, un puissant geyser crache de la fumée dans un bruit assourdissant, donnant l'impression que toute la terre tremble. Nous mangeons au sommet une soupe et un saucisson puis buvons un petit mate, établissant ainsi un nouveau record d'altitude pour cette activité argentine qui m'est chère.
Nouveau record d'altitude!
La fumée générée par le geyser Sol de Mañana, vu depuis le col, 4950m
Alors que nous profitons de la pause de midi, le ciel s'assombrit dangereusement. Des orages s'approchent de tous les côtés: nous n'y échapperons pas. Nous avons juste le temps de nous équiper avant qu'il ne se mette à grêler. Nous nous mettons donc à rouler sous des trombes d'eau et de glace, écoutant autour de nous le grondement du tonnerre, peu rassurant à des altitudes pareilles. La grêle nous fouette le visage, nous ne voyons plus rien, mais il faut avancer. Après une demie-heure de lutte épique contre le vent, la boue et les précipitations, nous sortons de l'orage et le ciel est à nouveau bleu.
Akira n'est pas bien loin d'une grosse rincée
Février 2113: l'hiver nucléaire dure depuis plus de dix ans.
Nous continuons avec une jolie descente sur la Laguna Colorada et terminons la journée par une dizaine de kilomètres de très mauvaise piste. Le passage des 4x4 dessine sur la piste de petites ondulations qui rendent la route très désagréable.

Le lendemain, la route est à nouveau très mauvaise. Sur plusieurs passages, il est impossible de pédaler et il faut pousser le vélo. Nous déjeûnons devant l'Arbol de Piedra, une énorme pierre sculptée par les vents de sable.
Couverture du catalogue "Les 3 Suisses" (et le Français), devant l'Arbol de Piedra
Pas toujours facile de suivre la bonne piste...
Martin et Séb donnent tout pour sortir du sable
Le soir nous trouvons refuge à l'Hotel del Desierto, qui porte son nom à merveille car il est situé en contre-haut d'un immense plateau de sable. Les chambres sont beaucoup trop chères: 160 dollars US pour quatre. Heureusement, la gérante nous propose de dormir dans le dortoir conçu pour les chauffeurs de 4x4 qui accompagnent les touristes, pour 12 dollars la nuit (ce qui reste en fait trop cher pour les chauffeurs, qui dorment dans leur voiture).
Hotel del Desierto, qui offre un panorama magique à 4500m
En quittant l'Hotel del Desierto, nous nous perdons, car des traces de 4x4 partent dans tous les sens avant de disparaître. Nous nous retrouvons à pédaler dans le lit d'une rivière et décidons de la suivre.
Le petit train à destination d'Uyuni est sur les rails (en fait des ornières de 4x4 très profondes)
Les rares panneaux sont anéantis par le vent, il faut jouer au puzzle pour trouver la bonne route


La route et la rivière se confondent... mais on ne sait pas où elles vont.
Lapin du désert (Vizcacha), peu effrayé par notre passage
Finalement nous nous retrouvons sur une piste au milieu d'une plaine sans savoir où nous sommes. Il faut dire qu'il n'existe pas de de cartes précises de cette région. Nous voyons un véhicule passer à toute allure de l'autre côté de la plaine, soulevant un nuage de poussière. Akira et Martin se lancent alors dans une course folle pour tenter de l'intercepter. Le chauffeur aperçoit le maillot orange d'Akira et vient à notre rencontre. Nous sommes bien sur la bonne route. En fin d'après-midi, nous longeons plusieurs lagunes magnifiques avec en point d'orgue la Laguna Hedionda, qui abrite des dizaines de milliers de flamants roses, c'est vraiment très impressionnant.
Descente sur Laguna Ramaditas
Descente finale sur la Laguna Hedionda
Il y a un hôtel où nous comptions dormir. Tout d'abord la tenancière me montre les tarifs: 115 dollars pour une chambre double. Je lui fais clairement comprendre que c'est bien au delà de notre budget. Je lui demande s'il n'y a pas un dortoir ou des chambres moins chères. "Non, il n'y a que ça". Puis après quelques minutes de discussion à voix basse avec sa collègue: "En fait si, il y a des chambres à 10 dollars par personne".
Laguna Hedionda en fin d'après-midi
Laguna Hedionda et ses milliers de flamands roses
Les lamas branchés se retrouvent à la plage
Le lendemain nous commençons la journée par une montée sur sable à plus de 10%, qui nous pousse dans nos derniers retranchements. Les pistes sont encore une fois très mauvaises, mais nous sommes motivés par le fait que 20km plus tard nous attend une piste stabilisée, utilisée par le transit international à destination du Chili. Les derniers kilomètres de piste sont effectivement bien meilleurs. Nous arrivons à Villa Alota en fin de journée, avec l'impression que le plus dur est derrière nous.
Un véritable mur, à plus de 10%.
Martin sur le point de terminer la dernière ascension de la journée
Akira en pleine montée
La route est enfin meilleure, ca se fête!
Les deux dernières journées sont plus faciles, car la route est incomparablement meilleure, notamment grâce au trafic généré par la gigantesque mine à ciel ouvert de San Cristobal, la plus grande du pays. L'arrivée à Uyuni offre un spectacle assez triste: nous longeons pendant 5 kilomètres une gigantesque décharge qui s'étend à perte de vue. C'est assez choquant vu qu'Uyuni reste un petit village.
Au fond, la mine à ciel ouvert la plus grande de Bolivie (on y extrait zinc, plomb et argent)
Dernière journée pas facile: tout droit sur du sable, très chaud, avec pas mal de trafic
Bataille de boue peu avant Uyuni
Uyuni est le camp de base pour tous les touristes qui partent vers le Sud-Lipez et le Salar d'Uyuni. On y croise des quantités impressionnantes de Japonais et d'Israéliens. Nous allons y passer quelques jours, pour mettre à jour notre blog, nous reposer et préparer la suite de l'itinéraire.
Un petit artisan redresse la roue voilée de Martin (qui n'a pas apprécié les pistes boliviennes)
Coucher de soleil sur le Salar d'Uyuni (partiellement immergé pendant la saison humide)
Nous prendrons bientôt la route à destination d'Oruro puis La Paz. Nous nous réjouissons de découvrir plus en profondeur la Bolivie. La route que nous avons choisie, beaucoup moins touristique, s'y prête parfaitement.

10 commentaires:

  1. merci pour ce blog magnifique!

    vos aventures sont passionnantes et les photos superbes.

    nous vous accompagnons pour la suite...

    La abuelita!

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  2. Wow muchachos! las fotos son cada vez más hermosas!!! viajamos con ustedes con cada post que hacen abrazos!!!
    los extrañamos!!!

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  3. Famille Tissot3 mars 2013 à 20:04

    Merci de nous faire partager vos aventures, nous avons toujours beaucoup de plaisir à vous lire.
    Vos photos sont magnifiques, on s'y croirait presque. Avec toute notre amitié
    Les Tissot

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  4. Preciosas las fotos.
    éxito para todos...
    Belen

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  5. Excellent! Bon vent à vous...

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  6. Impressionnant et impressionnés !!
    Belle route autour du monde...

    Babeth & Jean-Jacques

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  7. Vos photos sont magnifiques, comme votre "périple". Ca mérite des conférences et un livre à votre retour !

    Babeth & Jean-Jacques

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  8. Je suis complètement époustouflée et j'aimerais tellement pédaler avec vous.

    Bisous enchantés,

    Bernadette (et Pasquier)

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  9. Depuis que je suis vos aventures, j'éprouve de la tendresse lorsque je croise des cyclistes !
    Bravo pour vos performances et merci de nous faire rêver, et parfois frissonner.
    En vous souhaitant tout le meilleur pour la suite de voyage
    Marie-Christine (et Georges) W

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  10. Christiane Amici Raboud16 mars 2013 à 22:44

    J'ai beaucoup aimé les lamas branchés à la plage! Ce n'était pas la plus simple des étapes que celle d'affronter les pistes de sable (boue) avec des 10% en face...
    Bravo pour l'effort et bises
    Christiane

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